Désinformation, Histoire, Actualité

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DOSSIERS - BALKANS

1 LE CASTING DU THEATRE DES BALKANS

Dis papa, le Kosovo, c'est près du Sierra-Leone ?

Les dernières guerres balkaniques ont initialement engendré dans l'opinion française et probablement mondiale. le doute, l'incompréhension La méconnaissance de l'histoire et de la géographie amenait beaucoup à placer ces régions en Europe de l'Est, et le Kosovo en Afrique ou en Amérique centrale. En peu de temps pourtant, ces noms et zones inconnues étaient devenues le centre des préocupations. Télévisions, radios, presse, collectes dans les écoles, forums, campagnes d'agit-prop par des groupes intellectuels. Monsieur tout le monde évoquait Vukovar, Pristina, Pale, Belgrade, les Serbes, les Albanais, les Bosniaques ; tous ces noms dont il s'était passé jusque-là pour vivre devenaient l'objet de ses préoccupations.

Il fallait donc, en peu de temps, convaincre un grand nombre de personnes de quelques idées-forces. Dans la première guerre entre Croates et Serbes, après quelques hésitations, le camp croate fut classé fasciste et le camp serbe, légitime. Il fallait rapidement se faire une opinion et la propager, malgré le peu d'informations. L' Allemagne venait, en reconnaissant la Croatie indépendante d'ouvrir la boite de Pandore. Le drapeau à damier, symbole pour la plupart des Yougoslaves du régime de terreur d'Anton Pavelic, de ces Oustachis ralliés à l'Allemagne nazie et dont les méthodes avaient choqué même des Allemands pourtant endurcis. Pour les journalistes, c'était déjà un repère, que l'engagement de mercenaires et de quelques militants d'extrême droite vint compléter. Le gouvernement yougoslave, lui, ne voyait en rien sa légitimité atteinte dans l'opinion internationale ; issu du communisme version Tito, il bénéficiait plutôt d'une image positive. Certes le mot indépendance attirait la sympathie, mais l'ombre du soupçon fasciste planant sur les Croates engendrait la méfiance. La version officielle était donc : l'indépendance prise par les Croates est légitime, mais on ne peut soutenir les "orientations fascistes qui s'y manifestent". Les positions de Franco Tudjman, président croate, en septembre 1992 dans la revue Dialogue pouvaient pourtant donner quelques indications sur les orientations d'un tel gouvernement.

Le Croate passe de catholique et fasciste, à allié des forces de progrès et de libération.
Le Serbe résistant d'hier est nazifié

L'entrée en guerre de la Bosnie changea les données. Le chien de Pavlov opérant, le mot musulman était associé par automatisme à celui de victime. La désinformation était aisément et massivement recevable. D'une part l'opinion y était prête, instruite par une culpabilisation permanente liée à l'époque coloniale française et par la victimisation en France de tout ce qui touchait à l'immigration, d'autre part les moyens seraient considérables puisque les Etats-Unis jouaient alors la carte islamique. Le 17 décembre 1991, sous l'insistance de Bonn, l'Europe reconnaissait l'indépendance de la Slovénie et de la Bosnie, faisant ainsi voler en éclat la République Fédérale de Yougoslavie, violant l'Acte final d'Helsinki, la Charte de Paris et la Constitution Yougoslave. Cette dernière subordonnait toutes éventuelles sécessions de Républiques à un réferendum général qui n'eut jamais lieu.
Les Croates s'alliant avec les Bosniaques passsèrent de l'image de "nationalistes exacerbés parfois liés au nazisme" à celui d'alliés au sein de forces de libération luttant pour leur indépendance légitime et la reconnaissance des identités, musulmanes en particulier. Le Serbe devenait alors le méchant officiel et la machine de désinformation allait disposer de moyens jamais vus précédemment. La tache n'était pas bien ardue, vu l'ignorance des populations européennes sur l'histoire des Balkans, sur l'empire ottoman, sur les liens entre France et Serbie dans la première guerre mondiale. D'où venaient ces musulmans déclarant soudain que cette terre étaient à eux ? Quelles étaient les ethnies présentes dans la région ? Quel camp avait choisi chacun face à l'empire ottoman ? Quel camp avait servi chacun pendant les occupations italienne et allemande ?
L'homme de la rue l'ignorait : il lui fallait du simple et on allait lui en fournir. Le méchant serait très méchant, et la victime très à plaindre.

De l'autogestion au nazisme, de Wilhem Reich au IIIe Reich

Chez les Serbes : le chef de la Ligue communiste Yougoslave, celle qui avait inaugurée les thèses de l'"autogestion socialiste" si prisée par une partie de l'extrême gauche française (PSU) qui constituait aujourd'hui une bonne part des cadres du PS. Milosevic était devenu président de Yougoslavie, élu sans la moindre irrégularité signalée, sans la moindre contestation internationale, et personne jusque là n'avait décrit le moindre aspect tyranique du personnage. L'origine communiste autogestionnaire de son courant allait subtilement être effacée de tout commentaire médiatique pour les besoins du rôle de nouvel Hitler qui lui serait attribué par le casting international.
Ignorance historique aidant, les médias allaient faire passer pour nazi le seul peuple d 'Europe qui s'était libéré seul de l'occupant allemand, au prix d'une résistance héroïque. On allant même, surfant sur la version communiste officielle, transformer les Tchetniks, ceux qui avaient mené la résistance avant d'être liquidé par Tito, en nazis.(*)

D'anciens nazis devenus fréquentables, et même victimes

Chez les Croates, nous l'avons vu, les quelques hésitations initiales des médias devant les références oustachies furent abandonnées dès leur alliance avec les Bosniaques : si les Croates s'alliaient à des musulmans c'est donc qu'ils ne pouvaient être fascistes ! Cet automatisme surprenant a fonctionné au mépris de tout sens historique. En effet Croates, et musulmans bosniaques et albanais ont non seulement collaboré et bénéficié des occupations italiennes et allemandes, mais lui ont fourni des troupes, dont les deux célèbres divisions SS Handschar et Skanderbeg (*). Or, reconnaître que les pays musulmans, à l'exception de ceux sous tutelle française, avaient pris fait et cause pour le IIIe Reich n'était pas enseigné dans les manuels scolaires : on dérangeait le manichéisme établi et le rôle de victime attribué aux musulmans. Le méchant se devait d'être chrétien et le bon serait musulman. Evoquer un passé qui indiquait des divisions SS musulmanes et des chrétiens, orthodoxes de surcroît, résistants au nazisme, ne correspondait pas à la vision officielle souhaitée : il fut évité de le mentionner. Ce fut un tour de force, car Itzbegovitch lui-même avait été officier recruteur pour le IIIe Reich. Les médias en firent un héros et lui fabriquèrent une image de musulman modéré, alors que son programme politique initial, concrétisé en constitution, n'était rien de moins que la charia. (*)
En 1970, Alija Itzbegovic avait publié à Sarayevo la Déclaration Islamique ; rééditée en 1990 elle annonce sans équivoque un programme de République islamique.

division musulmane SS Hanschar

Les djihadistes modérés et les camps d'entrainement modérés

D'ailleurs, les Bosniaques dans leur ensemble étaient décrits comme musulmans modérés, sans aucun rapport avec les islamistes, et encore moins avec les courants terroristes. Il faudra attendre dix ans pour que l'on daigne reconnaître, à voix basse, que tous les courants terroristes du monde islamiste étaient venus servir, s'entrainer et recruter dans la filière bosniaque, chez ces fameux "musulmans modérés". Le gang de Roubaix, et de nombreux réseaux terroristes implantés en France trouvent leur origine dans ce lieu du djihad européen.(**)
La tache des hommes politiques et des médias n'étaient pas aisée : il fallait taire l'histoire des Balkans, notamment les périodes ottomanes et allemandes, présenter comme modérés des islamistes venus du monde entier dirigés par un ancien nazi, et en faire des victimes, et diaboliser un peuple qui avait, seul en Europe, combattu et défait le nazisme. Les grands moyens furent utilisés. Ce que la première guerre du golfe avait amorcé en matière de désinformation massive allait atteindre des sommets.

Le fond commun du système de pensée

Comment cette désinformation aussi grotesque a-t-elle pu prendre aussi rapidement et à une telle échelle ? L'ignorance des populations européennes et américaines, pourtant instruites, et la puissance du rouleau médiatique expliquent certes bien des choses, mais ne répondent pas à la question essentielle. Quel est le fond de pensée qui a fait que l'on avait envie de croire à cette version officielle ? Le tout n'était pas de savoir si la version officielle était crédible, mais de comprendre pourquoi on voulait la croire. Que confortait-elle chez ceux qui y adhéraient ? Sur quoi reposaient les mécanismes d'aliénation qui taisaient, modifiaient, transformaient les faits pour les rendre conformes à l'opinion souhaitée ?

Les clichés confortés par la version officielle sont nets :

- le musulman est victime par définition
- le musulman ne peut être impérialiste, et encore moins nazi
- l'islam est une religion de paix et de tolérance
- s'opposer à des musulmans est synonyme de fascisme
- partout où est le musulman, l'autre le colonise

- le chrétien est nécessairement l'agresseur, sauf s'il s'allie aux musulmans
- le nationalisme, c'est la guerre (sauf si le nationalisme est musulman, noir ou asiatique éventuellement)
- le militaire blanc, chrétien de surcroit, est nécessairement fasciste et colonisateur (même en son propre pays) sauf s'il se rallie aux musulmans
- les populations blanches et chrétiennes veulent la guerre, et sont capables de toutes les horreurs et sévices

Tous les faits décrits par les médias visent à illustrer cette version. Les faits non conformes à cette vision sont immédiatement écartés. C'est ce fond de pensée, entré à coups de marteau dans les cerveaux européens et américains par des décennies d'aliénation, qui rend la désinformation possible et crédible. On ne veut la croire parce que les faits seraient vrais mais parce qu'ils confortent cette vision où chacun a un rôle défini et inamovible. Le Liban avait déjà servi de laboratoire à cet effet de diabolisation des chrétiens et de victimisation des musulmans.

Chiens d'infidèles et chien de Pavlov

Le chien de Pavlov était rôdé et réagissait au moindre signal : signal blanc et chrétien, il grondait ; signal musulman, africain, il salivait et remuait la queue. Jean-Paul Sartre qui avait dit "tout anticommuniste est un chien" (*) dirait probablement aujourd'hui "tout anti-islamiste" est un chien ; BHL a pris la relève depuis. Sartre ignorait probablement tout du chien de Pavlov mais aurait sans doute eu plus de considération pour cet animal dont il utilisait le nom comme insulte, s'il avait saisi les possibilités de dressage qu'il offrait, et son extension à l'être humain.
Ironie de l'histoire, ce sont les journalistes que le président François Mitterrand traita de chiens dans un discours public après le suicide de Bérégovoy "livré aux chiens", selon lui.
Ces quelques disgressions ou errances canines ne doivent pas nous écarter de l'étude de ces mécanisme pavloviens, et de l''analyse des déjections selon le dressage subi.

Husseini
Al Husseini, grand mufti de Jérusalem, inspectant le chien de fusil  d'un
musulman bosniaque sous uniforme allemand.