Désinformation, Histoire, Actualité

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HISTOIRE - THEORIES ET METHODES-

La désinformation, d'une guerre à l'autre du XXe siècle

La désinformation stratégique de guerre :

La désinformation stratégique, de type militaire, est depuis longtemps connue de tous, de Sun-Tzu à César dans « la guerre des Gaules » en passant par la bleuite d'Algérie. Du cheval de Troie aux leurres modernes, des communications de faux plans d'opérations imaginaires, cette désinformation militaire vise, par la ruse à tromper des forces armées ennemies.
Des sections de chaque armée seront destinées à ce travail dit d'intelligence ou de renseignements qui utilise, parmi d'autres outils, la désinformation.
Ces méthodes sont décrites avec précision et font partie d'un plan de bataille.
L'action sur les populations civiles ne fut pendant longtemps utilisé qu'à des fins indirectes d'action sur le moral des troupes. On exagère ses propres succès tandis que l'on tente de convaincre les populations des armées ennemies que sa situation est désespérée, que leur combat est illégitime. On vise enfin à semer le trouble chez l'ennemi en développant l'idée d'intérêts divergents entre l'armée, son état-major, le gouvernement d'une part et la population de l'autre. La désinformation allait passer bien vite d'arme indirecte à arme directe. Les conflits devenant plus idéologiques que nationaux, la désinformation des populations devint une arme décisive, et le contrôle idéologique devint un enjeu en soi.

Evolution des types de guerre au cours du XXe siècle

Nouveaux types de conflits

Les actuels conflits armés revêtent de nouvelles formes qui amènent de nouvelles méthodes de désinformation.
Les temps d'invasion d'un pays voisin pour agrandir ses propres frontières, de conquêtes de territoires lointains pour les occuper, les gouverner, les peupler semblent pratiquement révolus. Le partage du monde est achevé, et malgré des litiges subsistants sur des zones, le tracé des états est précis et de nombreux traités régissent le tout. La dissuasion nucléaire est venue constituer l'essentiel de la défense des pays développés et les contrôles économiques de pays se font sans nécessité de présence militaire, si ce n'est en période de crise aigue dans les relations entre pays.

La guerre révolutionnaire vint modifier totalement cette donne à travers diverses étapes :

Le terrorisme, utilisé dès la fin du XIXe siècle par des courants anarchistes, visait essentiellement des dirigeants politiques, militaires, économiques et n'était l'œuvre que de petits groupes ou d'individus. Il se transforma, avec la naissance du communisme en actes planifiés, coordonnés avec des actions de masse. Il subsista tant que ces partis et mouvements prônèrent la révolution par insurrection armée.
La révolution russe devint le modèle de guerre révolutionnaire, utilisant une guerre classique pour y retourner des troupes « contre ses propres généraux » et pactiser avec l'ennemi selon une utilisation mutuelle. La notion de patrie disparaissait pour faire la place à un nouveau cadre idéologique internationaliste. La lutte des classes remplacerait la lutte des nations.
Bien vite les difficultés internes de l'URSS, l'absence de déclenchement des révolutions prévues (Allemagne notamment) firent réviser l'idée de révolution mondiale.
Les acteurs de conflits n'étaient plus uniquement des armées classiques. Intervenaient des populations, des partis, des mouvements qui remplissaient le rôle de forces armées.

De la défense de la nation à la défense d'un camp idéologique transnational

La ligne officielle de l'Internationale communiste devint en priorité dès 1920 la « défense de l'URSS patrie des prolétaires ». Dès lors son intérêt d'Etat devint prioritaire et l'abandon de mouvements révolutionnaires au profit d'Etats à préserver stratégiquement fut observé en plusieurs cas (Espagne, Allemagne).Bien avant le pacte germano-soviétique, l'URSS avait tissé de nombreux liens avec l'Allemagne puisque le réarmement, et la création de l'aviation allemande se firent en majeure partie sur le sol soviétique. Les révolutions espagnoles et allemandes étaient abandonnées par l'URSS. Les dirigeants se réfugièrent à Moscou, où ils disparurent pratiquement tous, certains étant même livrés par la suite à la gestapo.(*)
Seule l'entrée en guerre de l'URSS contre l'Allemagne en 1941 renversa ces alliances.
La nouvelle ligne officielle devint « le front-uni antifasciste » (terme pourtant rejeté par les mêmes dans les années 1930) : la lutte des classes passait au second plan, et la lutte des nations était réintroduite sous couvert d'alibi idéologique. Ce n'est d'ailleurs qu'après guerre que l'on insista sur l'aspect idéologique anti-nazi : pour l'armée de 1940, puis pour celle reconstituée en Afrique, il s'agissait de bouter l'envahisseur, ou même, pour les communistes entrés par la suite en résistance de propager le slogan « à chacun son boche ».
La fin de la deuxième guerre mondiale déboucha sur un nouveau partage du monde : ce que l'URSS n'avait pu conquérir par des révolutions encadrées par ses sections locales de l'Internationale communiste le serait par l'armée rouge. Les partis communistes d'Europe de l'ouest abandonnant l'option insurrectionnelle dès les années 1950, le flambeau en fut repris par d'autres courants marxistes.
Seules les guerres révolutionnaires d'indépendance devinrent légitimes aux yeux des partis communistes devenus réformistes.
Le phénomène de guerres par des populations, partis, mouvements déjà été observé au cours de guerres civiles, devint un phénomène international majeur. Il disposait pour cela d'Etats communistes capables de diriger un gigantesque appareil de partis, troupes et mouvements dans le monde entier, adaptant les directives locales ou nationales selon les intérêts de son propre camp.

Les guerres révolutionnaires d'indépendance- les années 1946-1975

L'URSS, puis la Chine, participèrent à des guerres révolutionnaires dans le monde entier, de la Corée au Cambodge, en passant par l'Algérie, le Congo, utilisant ou créant des mouvements indépendantistes armés contre les anciens empires coloniaux. Les Etats-Unis utilisèrent également, et parfois créèrent, certains de ces mouvements afin de prendre la place des anciennes puissances européennes.Si le clivage mondial avait pour chefs de file les USA et l'URSS, comme l'illustra la guerre froide, les intérêts ponctuels pouvaient engendrer des alliances et utilisations de mouvements de l'autre camp pour affaiblir des concurrents. Ainsi l'on vit les Etats-Unis soutenir des mouvements communistes insurrectionnels en Afrique et en extrême Orient, contre la France, et plus récemment des mouvements islamistes contre l'URSS, puis contre l'Europe.
De même on vit l'Internationale communiste soutenir localement des courants royalistes, des courants islamistes également.

L'abandon des guerres révolutionnaires communistes en Europe

En un siècle le monde était passé des conflits entre empires pour le partage du monde, avec ses armées classiques, aux guerres révolutionnaires, puis aux blocs idéologiques internationaux. Ainsi le soutien à l'un ou l'autre des blocs devint au sein des Etats et des populations le clivage majeur. De Gaulle joua un rôle majeur, jouant sur ces rivalités, utilisant tour à tour l'un ou l'autre de ces camps, pour empêcher la disparition de la souveraineté nationale au profit de l'appartenance à un camp. Il contribua ainsi à éviter la prise de pouvoir en France par le PCF, plus gros parti communiste européen disposant de structures armées.
Si le PCF soutint activement les guerres révolutionnaires en Indochine, puis en Algérie, contre la France, avec divers sabotages, propagandes, désinformations, il ne participa pas directement (sauf rares exceptions) à ces conflits armés. Il en fut le propagateur idéologique en France, y organisa quelques soutiens politiques, financiers, logistiques sans aller au conflit armé. On était loin de la révolution russe avec mutineries et de la révolution espagnole avec ses brigades internationales.

L'idée de guerre révolutionnaire disparaissait de la scène européenne et des directives communistes. De nouveaux courants tentèrent de reprendre ce flambeau dans les années 1960 à 1975, des trotskystes aux guévaristes, des pro-chinois aux nouveaux anarchistes, sans véritable succès si ce n'est le déclenchement de journées d'émeutes en 1968. Soutenant les guerres révolutionnaires partout où elles se produisaient dans le monde, ces courants en abandonnèrent l'idée dans leurs propres pays d'Europe pour passer à une optique plus gramsciste de conquête idéologique et culturelle, et plus trotskyste d'infiltration et prise de pouvoir des postes clefs.
Seuls quelques courants marginaux, maintenant l'idée de révolution armée, évoluèrent vers le terrorisme et furent souvent aidés et instrumentalisés par le bloc de l'Est.

La chute du camp communiste

Les faillites des modèles communistes partout dans le monde, du Cambodge à la Chine, de Cuba à la Yougoslavie, la chute du mur de Berlin par implosion et faillite, marquèrent la fin des révolutions communistes. Si les diverses méthodes militaires ou économiques furent utilisées par l'Occident pour affaiblir les Etats communistes, les corruptions et affaiblissements idéologiques divers pour neutraliser les partis communistes européens, c'est davantage la diffusion mondiale d'informations, d'images qui leur porta le coup fatal.
L'époque des satellites et des télévisions dans chaque foyer ne permettait plus les dissimulations des réalités en territoire communiste.
La victoire n'avait pas été celles des armes, elle fut plus celle de l'image que de la pensée.
Les révélations d'atrocités (goulag, génocide cambodgien, camps de concentration soviétiques), les comparaisons des modes et niveaux de vie ne furent plus réservées à quelques personnes bien informées. Le rejet de ces aspects devenus connus du grand public ne s'accompagna d'aucun bilan théorique poussé du marxisme. Ainsi seuls les « excès » du communisme furent dénoncés, tandis que le fond idéologique continuait à orienter une grosse part des pays occidentaux, Etats-Unis compris. Le pragmatisme et l'observation des effets avaient provoqué le démantèlement d'un système politique et économique, mais laissait presque intact le système idéologique et les fondements de pensée qui en constituaient l'origine.
Ces strates idéologiques et cette orientation générale joueraient un rôle dans les nouvelles guerres à venir.

Les nouvelles guerres révolutionnaires et les nouveaux camps idéologiques

Si les guerres révolutionnaires d'indépendance avaient recyclé bon nombre d'anciens révolutionnaires européens en tiers-mondistes actifs, elles avaient surtout vu l'apparition de nouveaux courants dans les mouvements du tiers-monde. Les diverses tentatives de socialisme à l'Africaine furent de retentissants échecs, et l'URSS s'occupait davantage de ses propres intérêts nationaux que de la pureté idéologique et des succès économiques dans les systèmes mis en place. Le marxisme joua certes un rôle considérable dans la formation idéologique des divers mouvements de libération et dans celle des nouvelles élites dans le tiers-monde, mais fut vite supplanté par une idéologie renaissante : l'islamisme.
Cette orientation était fortement présente dans la guerre d'Algérie. L'Egypte et le courant des Frères Musulmans y avaient joué un rôle majeur, appelant sur ses radios à « débarrasser la terre d'islam de toute présence impure ». Cet aspect n'était nullement mis en avant dans les présentations proposées en Europe : les tiers-mondistes européens traduisaient « lutte de libération nationale » et les partisans du maintien de la France traduisaient « mouvement révolutionnaire communiste ».
Cet aspect idéologico-religieux, pourtant observé par les services français de renseignements, ne fut jamais perçu comme majeur. Il marque pourtant le début de la renaissance islamique, prenant le pas sur l'idéologie marxiste dans le tiers-monde, tout en utilisant tous les acquis et méthodes. Il s'agit presque d'une absorption du marxisme par l'islam.
Là où certains s'obstinèrent à ne voir que religion, c'est-à-dire spiritualité, il était manifeste qu'une nouvelle idéologie révolutionnaire était en gestation. Le travail antérieur de légitimation de toute lutte provenant du tiers monde, censée remplacer la lutte de classes par la lutte Nord-Sud (pour simplifier) allait jouer un rôle essentiel de légitimation de ces courants. De même le travail de délégitimation entrepris pendant des décennies à l'encontre de la civilisation européenne allait également servir à ce nouveau courant.

L'acte majeur, le premier succès de cette nouvelle idéologie révolutionnaire fut la révolution iranienne. Elle fut d'ailleurs saluée comme une libération par la presse française pour le fait essentiel qu'elle représentait une opposition aux Etats-Unis (factice d'ailleurs puisque les Etas-Unis avaient abandonné le Shah). Ce genre de mécanisme réflexe avait déjà été observé au Cambodge, se souciant peu des suites, des idéologies et systèmes qui orientaient les courants, mais les légitimant par le simple fait qu'un mouvement du tiers-monde s'opposait à un pays riche. A défaut d'avoir pu abattre le capitalisme par ses propres guerres révolutionnaires et d'instaurer un système d'obédience marxiste, on se contentait de soutenir tout ce qui s'opposerait aux pays censés représenter le capitalisme.Peu importait que le système mis en place soit capitaliste, théocratique, ou capitaliste d'état, discriminatoire, concentrationnaire, dictatorial : il devenait légitime par son appartenance au tiers-monde et par l'ennemi qu'il était censé affronter (malgré de nombreuses alliances et utilisations réciproques).
Ces bases idéologiques n'avaient jamais été solidement prises en compte dans leur influence sur les courants d'opinion. Or cette dialectique était devenue presque automatisée et dominante dans les populations des pays développés. Le marxisme d'où provenait l'essentiel de ces mécanismes n'avait jamais été démantelé idéologiquement.Les conflits antérieurs, Viêt-Nam notamment, avaient pourtant démontré l'importance de l'opinion dans le rapport des forces, tout autant que celle des forces militaires, et même capable d'une influence croissante sur ces dernières.
La masse d'informations, de désinformations, de révélations, d'images ne pouvait suffire à jouer un rôle décisif tant que les mécanismes fondamentaux de pensée restaient inchangés.Mieux, ces mêmes mécanismes de pensée qui avaient servi les guerres révolutionnaires communistes allaient resservir dans les guerres révolutionnaires islamiques.

Le nouveau terrorisme de masse et l'impuissance des démocraties

La dissuasion nucléaire est venue constituer l'essentiel de la défense des pays développés et les contrôles économiques de pays se font sans nécessité de présence militaire, si ce n'est en période de crise aigue dans les relations entre pays.Cette dissuasion a joué son rôle face au bloc de l'Est qui l'utilisa en retour jusqu'à ce que l'escalade s'achève par de nouveaux traités pour une régulation. Face aux guerres révolutionnaires, face aux guérillas, face au terrorisme, cette dissuasion ne pouvait être adaptée. Elle ne s'appliquait qu'à des Etats capables d'en menacer d'autres, pas à des mouvements insurrectionnels ou terroristes. Or, si des états, comme l'Arabie Saoudite, l'Iran, la Libye, la Syrie, le Soudan développèrent et fomentèrent le terrorisme, ils ne le firent jamais officiellement, prenant garde à ne pas entrer en conflit direct avec les Etats cibles. Le temps des déclarations de guerre était révolu, laissant la place à des guerres officieuses effectuées par sous-traitance.

La dissimulation était partagée : les états souhaitant un bouleversement des équilibres existant ne pouvaient affronter directement des Etats plus puissants et tenaient à conserver une légitimité tant dans leurs populations que dans celles des pays visées. Le discours tiers-mondiste évoqué plus haut connut un développement sans précédent.Les états cibles, pays développés, n'avaient nul intérêt au développement de conflits nuisibles à la prospérité et à la stabilité. Ainsi, négociation et diplomatie, médiations, subventions et aides humanitaires devinrent leur mode privilégié d'intervention. Le Liban fut l'illustration parfaite de ce refus de prendre position mais de tenter de s'insérer en médiateur pacifique.

Le recul permet sans doute de voir aujourd'hui quel est le résultat de cette intervention pacifique qui déboucha sur la victoire du camp qui déclencha le conflit et se solda par une occupation syrienne du pays. En outre pour les pays développés, la stabilité est un enjeu économique essentiel. Chaque évènement déstabilisant a un effet boursier immédiat connu à la minute dans le monde entier. La confiance en cette stabilité joue un rôle aussi important que la réalité de cette stabilité. Le développement de l'intelligence économique ces dernières années atteste de l'importance du travail d'information et de désinformation dans ce secteur.

Le consensus à tout prix

La faiblesse des démocraties résidait dans le fait que stabilité, paix et prospérité étaient essentiels à leur fonctionnement. Si la volonté d'éviter des conflits externes était manifeste, elle s'accompagnait de la nécessité absolue d'un consensus interne. Ainsi malgré des séries d'actes terroristes commis en France, aucun état ne fut officiellement désigné responsable de ces tueries. Les services français avaient pourtant l'ensemble des données mais la raison d'état fit déboucher sur des négociations avec les états commanditaires. Un magistrat, contraint de libérer un des terroristes malgré les preuves abondantes, fut caricaturé dans le journal Le Monde et se suicida (**).
Le consensus interne indispensable à la sérénité d'un état démocratique exigeait que les affronts, atrocités, humiliations infligées au pays soient tues à l'opinion. L'absence de réaction n'était possible que par absence ou falsification d'informations.

Par ces failles, la démocratie parvenait, pour subsister, à un fonctionnement opposé à sa propre existence : désinformer sa propre population afin d'éviter tout conflit. L'Etat se mit ainsi à utiliser cette arme destinée autrefois à l'ennemi contre sa propre population et utilisa les méthodes et les personnes adaptées à ce travail. C'est ainsi que les médias français continuèrent même sous des gouvernements de droite à maintenir le monopole de gauche et d'extrême gauche (***). Mieux, les indispensables soutiens inconditionnels au tiers-mondisme, fût-il tour à tour communiste, islamiste, terroriste, devinrent de fait des organes d'Etat. Le Monde, Libération, l'Humanité ne vivaient pas de leurs lecteurs : ils étaient devenus, comme bon nombre d'anciens militants d'extrême gauche recyclés dans les médias (Plenel, July, Miller, Field, BHL) des outils du pouvoir.

D'opposants à maîtres en doctrine officielle de désinformation

Les justificatifs de non-intervention face à des déclarations et actes de guerre effectués par l'islam révolutionnaire et ses états commanditaires passa par le silence des faits ou des coupables réels dans un premier temps, puis par la légitimation non ouvertement des actes, mais de leurs motivations.Pour cela, les courants issus du marxisme étaient indispensables à l'Etat : mieux que quiconque ils pouvaient véhiculer la légitimation de toutes méthodes, même celle du terrorisme aveugle sur des populations civiles, par l'alibi du tiers-mondisme et de la victimisation.

Chacun y trouvait son compte : l'Etat, négociant avec ceux qui lui déclaraient la guerre, taisant les menaces, gagnerait en stabilité et en image « positive » selon les méthodes de marketing. Les courants tiers-mondistes propageant les justificatifs et justifiant les motivations avec un soutien étatique travailleraient à leur cause révolutionnaire, fût-elle devenue islamiste, avec l'avantage de statuts, reconnaissance et prébendes inespérés.

Une caste d'intelligentsia d'Etat se constitua, devenant les porte-parole argumentaires officiels et uniques des décisions gouvernementales. Les guerres des Balkans, puis d'Irak firent apparaître un front uni des intellectuels de la pensée officielle. Les anciens conseils de guerre furent remplacés par le lynchage médiatique et les anathèmes de la caste envers qui osait dénoncer la moindre falsification des informations. Régis Debray fut ainsi jugé traître aux maîtres officiels des droits de l'Homme pour avoir osé dire ce qu'il avait vu au Kosovo.
La désinformation interne devint la suivante : l'Etat taisait la guerre en cours, le djihad, qui lui avait été déclarée, afin de ne pas avoir à la faire, les médias justifiaient les motivations de ceux qui avaient déclaré la guerre à leur propre pays. L'ancien fond idéologique décrit plus haut servait au plus haut point dans cette drôle de guerre.
La désinformation n'était plus dès lors destinée avant tout à leurrer un ennemi, elle était devenue garante indispensable de pouvoir sur sa propre population.Paradoxe d'une démocratie : avoir pour ennemi principal les capacités de réaction de sa propre population et utiliser contre elle les armes psychologiques de légitimation de l'ennemi, celui qui déclarait et faisait la guerre.

D'anciens mécanismes réactivés

Tiers-mondisme, victimisation, culpabilisation avaient déjà servi à des totalitarismes antérieurs à installer des dictatures dites socialistes ou populaires. Si les effets avaient été condamnés, les sources idéologiques et les modes de pensée continuaient à sévir à grande échelle.Les justificatifs servant la guerre révolutionnaire islamique, le djihad, pour la rendre acceptable, légitime, aux yeux des populations européennes, étaient semblables à ceux utilisés pour les guerres révolutionnaires marxistes. Le prolétariat, devenu « le tiers-monde », se devait de lutter non pour son développement en vue de l'amélioration de sa condition, mais pour le renversement de la classe possédante, devenue « les pays développés ».
« Les prolétaires n'avaient pas de patrie » avaient répandu les marxistes par des méthodes passant de la désinformation historique au sabotage militaire des années précédent 1940, jusqu'à la dérision et « ringardisation » de tout ce qui pouvait être perçu comme national.L'internationale communiste verrait son argumentaire repris par l'internationale islamiste pour qui la notion de nation est un poison hérité du colonialisme, même si, ponctuellement des motivations nationales (Algérie, Palestine) pouvaient être utilisées
La désinformation viserait donc la notion de nation et de patrie. L' Histoire en serait donc un domaine privilégié. Pour parvenir à délégitimer un pays, il fallait nécessairement délégitimer son existence, son passé, ses traditions, ses valeurs. Le marxisme avait déjà accompli une part énorme du travail, l'islamisme complèterait l'attaque.

La globalisation anonyme ou la négation de l'ennemi par désincarnation

L'opposition à cette guerre n'était pas bien virulente : comme on avait dénoncé les « excès du marxisme » sans jamais en juger les théories responsables, on allait parfois oser critiquer « l'islamisme radical » ou mieux encore « tous les intégrismes » (censés tous se valoir et représenter les mêmes dangers) mais à aucun moment il ne serait fait état des théories de base de ce nouveau totalitarisme et de son aspect intrinsèquement guerrier.
La dépersonnalisation de l'ennemi par globalisation faisait partie de l'arsenal de la désinformation de guerre : ceux qui dans les années 1930 militaient contre le militarisme en général oeuvraient en fait sans le dire contre celui de leur propre pays, ce qui revenait à soutenir le militarisme allemand. Les pacifistes à l'époque de la guerre au Vietnam e au Cambodge oeuvraient de fait pour la victoire du communisme et non contre la guerre puisqu'ils soutenaient la guerre révolutionnaire. Ceux qui ensuite luttaient contre toute idée de nation luttaient de fait avant tout contre la leur.
Comme on pouvait jadis être qualifié d' « anticommuniste primaire », on serait qualifié d'islamophobe à la moindre critique du dogme idéologico religieux. Dénoncer les excès de temps en temps passait encore, mais oser critiquer le dogme et ses adeptes devint aussi risqué qu'oser railler les écrits de Lénine sur la place Rouge où ceux de Khomeiny à Téhéran.

La méthode de « globalisation anonyme » atteint son paroxysme du fait que l'Etat a pris l'option de pactiser et d'éviter tout conflit avec lui. Ainsi les « excès » ne lui seront pas même imputés : on parlera du « terrorisme » en général sans en spécifier l'origine, de l'antisémitisme, en évitant d'en caractériser les auteurs, de « tous les intégrismes » sans préciser lequel place des bombes et déclare la guerre.
Un article récent du Monde parvenait au tour de force de parler des massacres et mises en esclavage au Soudan sans mentionner une fois l'idéologie et la nature du régime qui les commettait. Les mots islam, islamisme, charia, djihad sont absents de l'article, comme si un article sur les camps de concentration était écrit sans que le mot nazisme n'y figure. (****) La manœuvre est plus pernicieuse qu'il n'y paraît : comment lutter contre un ennemi que l'on ne peut nommer et dont on ne peut désigner le courant idéologique ?
La réponse est simple : on ne lutte pas contre lui puisqu'il est déguisé en abstractions. On luttera donc contre des concepts généraux : le terrorisme, le racisme, l'intégrisme, sans en nommer les auteurs et sans s'opposer à eux. Mieux, renvoyant dos à dos « les intégrismes » on parvient ainsi à banaliser le seul d'entre eux qui utilise le terrorisme et dissimule à peine, par double langage, ses appels à la guerre révolutionnaire islamique : le djihad.

La présence de guerriers en territoire ennemi

Si les communistes avaient travaillé contre la France au profit de l'URSS patrie des prolétaires, ils connurent également des périodes patriotiques, parfois par tactique anti- américaine après 1945, ou par tactique anti-allemande à partir de 1941 pour soutenir l'URSS, mais pas uniquement par choix tactiques.En effet, malgré les pressions idéologiques et le contrôle de type mussolinien qu'exerçait « le Parti » sur ses ouailles, un attachement à la nation (qui leur était reproché par les trotskystes) restait réel chez les militants de base et même chez certains dirigeants. On vit d'ailleurs en 1971 une campagne du PCF, sur le thème « produisons Français », apposer des autocollants avec ce slogan surmonté d'un coq tricolore et la mention « fabriqué par des ouvriers français ». Une telle campagne serait aujourd'hui attribuée automatiquement au Front National.

Les nouveaux combattants de la révolution étaient tout autres : un éventuel attachement à la France leur était inconcevable et même totalement étranger. La guerre sainte, le djihad était déclaré, et si l'on évitait toutefois la maladresse de le déclencher trop tôt dans ce qui était une solide base arrière, la France, on ne faisait pas mystère de la haine et de la volonté de destruction envers elle. Il ne s'agissait plus de viser une classe, un système ou même un gouvernement mais bien un pays et un peuple.
C'était bien une guerre et la désinformation consistait aujourd'hui à ne pas reconnaître qu'elle avait été déclarée, à en nier l'existence et les objectifs, et à refuser d'en nommer les auteurs.

Après un Munich d'avant guerre, la France connaissait un Munich en guerre dont la désinformation était l'arme essentielle, grâce au conditionnement à l'oeuvre en quelques décennies..

OP